Article de Maroc Hebdo en réponse aux interventions de Jamaï et My Hicham sur le Nouvel Obs

Publié le par lanastaslim

Aboubakr Jamaï et le Prince Moulay Hicham annoncent

des émeutes sanglantes pour le Maroc

 

Une sinistre prédiction

 

RÉACTION. Dans son dossier consacré aux événements de Tunisie, l’hebdomadaire français Le Nouvel Observateur a publié une interview de Aboubakr Jamaï et une déclaration de Moulay Hicham qui nous interpellent.

 

Par Abdellatif Mansour

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Aboubakr Jamaï (à gauche) et le Prince Moulay Hicham.

 

 

Les événements de Tunisie ont provoqué une série de réactions d’horizons multiples. Une question est revenue de façon incessante et lancinante: jusqu’à quel point ces émeutes sont-elles transposables et imaginables dans un pays comme le Maroc? Il faut tout d’abord reconnaître que le Maroc a été relativement épargné par cette spirale imaginative, dans les médias occidentaux. Non pas par une quelconque complaisance, mais par la réalité de la solidité de ses institutions, la vérité vraie de son fonctionnement politique et, surtout, le rapport de la société à l’État. Ce sont là les repères vitaux qui font défaut, par exemple, à notre voisin algérien.

Malheureusement, certains de nos compatriotes ont cru devoir accabler leur propre pays. C’est ainsi que Le Nouvel Observateur (n°2411 du 20 au 26 janvier 2011) a publié deux interventions sur un éventuel transfert des événements de Tunisie au Maroc.

 

Raccourci fantasmagorique

La première est de Aboubakr Jamaï, fondateur du Journal hebdomadaire, qui ne paraît plus. Pour lui, le soulèvement populaire de Tunisie n’est pas seulement probable au Maroc; il est souhaitable. Pire, il serait beaucoup plus sanglant. Au profit de qui? Certainement pas les révoltés de son sinistre scénario. Pour cautionner sa funeste prédiction, il a rassemblé un cocktail d’éléments jugés symptomatiques, dans un raccourci à la fois hyper électrique et manifestement fantasmagorique. Le corpus argumentaire de Aboubakr Jamaï laisse perplexe. Il fait une focalisation sur une holding à participations multiples, dont des parts royales.

À l’entendre, le tissu macro-entrepreneurial du pays se résumerait à ce point de fixation. Il sait pertinemment qu’il n’en est rien. L’espace financier national compte plusieurs pôles d’investissement qui ne sont pas seulement des lieux de capitalisation, mais aussi et surtout des outils d’intervention sur l’économie réelle du pays.

Ces grands groupes constituent des locomotives à effet d’entraînement d’une amplitude bénéfique et salutaire pour l’ensemble de l’économie nationale. Ils sont producteurs de richesses réinvestissables, pourvoyeurs d’emplois et acteurs de première ligne dans l’équipement infrastructurel du pays. Mieux, ils contribuent, pour l’essentiel, à l’assiette fiscale et, partant, aux recettes de l’État.

Il s’agit là d’une vérité intangible qui a demandé du temps, de la stratégie et une certaine vision prospective pour avoir valeur de colonne vertébrale du Maroc d’aujourd’hui. Ce n’est pas pour rien que le pays bénéficie d’un capital confiance certain auprès des investisseurs étrangers en Europe et en Amérique.

 

Perspective cauchemardesque

Toutes ces données objectives, connues et reconnues en tant que telles, Aboubakr Jamaï les balaie d’un revers de la main.

Le Maroc, selon lui, serait au bord d’une déflagration générale, voire une guerre civile où les morts se compteraient par milliers; une guerre régicide qui verrait le pays basculer dans le chaos et l’inconnu. Un véritable appel à la loi de la rue, un désir irrépressible de “fitna”. Nous avons nos difficultés économiques et nos problèmes sociaux; ils sont multiples et même graves dans certains secteurs de la vie nationale. Mais pas au point de servir de tremplin pour souhaiter à son pays une perspective cauchemardesque où il serait à feu et à sang. Surtout que l’apport de solution aux déficiences socio-économiques cumulées et criantes se fait à un rythme jamais égalé, certes avec une efficacité parfois inégale. Les réformes institutionnelles réclamées pour la réhabilitation de l’action politique devraient arriver dans la concertation, le calme et la sérénité.

La deuxième intervention, dans la même publication parisienne, a été offerte par Moulay Hicham. Après les précautions sémantiques et les circonlocutions d’usage, le Prince s’est hasardé à un parallèle irréel et irrecevable entre le Maroc et l’Algérie, dans une globalité sans nuance.

 

Erreur de jugement

Il nous a affublés des mêmes maux économiques et sociaux en nous mettant sur la même grille de lecture et sur la même table d’évaluation. Plus qu’une erreur de jugement, un tropisme politique. Encore une fois, nous avons nous aussi une foultitude de facteurs non économiques de sous-développement.

On en est malade, mais on se soigne, à longueur des semaines et des mois, sinon tous les jours, avec le peu de moyens dont nous disposons. Précisément, Son Altesse a juste omis de rapporter “les disparités socio-économiques” au revenu global de chacun des deux pays. Une distance sidérale en soi et en chiffres.

Nous n’avons pas la manne pétrolière providentielle de l’Algérie, mais nous nous employons à faire sans, alors que nos voisins n’ont pratiquement rien fait avec. Ceci, sans compter l’immense décalage au niveau des libertés fondamentales. Cette propension à comparer l’incomparable, avec une sorte d’auto-braquage, est pour le moins inquiétante, surtout au regard de la nature des rapports entre notre pays et une Algérie qui ne nous veut pas que du bien.

En définitive, ces deux interventions ont un point commun des plus intrigants. Elles se rejoignent dans cette prédiction funeste d’un soulèvement sanglant, au cas où celui-ci se produirait chez nous.

Proprement troublant.

copyright MHI

Publié dans Revue de Presse

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